Va-t-on vers la fin de la taxe carbone européenne ?
Le Point
Sous la pression des politiques et des industriels, le sujet va être remis sur la table, à la Commission européenne, pour notamment assouplir son application.
Par Thomas Graindorge

Certains industriels exigent un maintien des quotas des émissions de CO2 gratuits jusqu’à 2030. © Natalie Behring/AP/SIPA
La taxe carbone aux frontières va-t-elle passer à la trappe ? Longtemps une lubie franco-française, rappelle Le Parisien, cette « taxe carbone européenne » aurait permis de forcer les industries européennes important des produits polluants fabriqués hors du continent à payer une compensation. Adoptée en 2022, elle devait être mise en place à compter du 1er janvier 2026, mais pourrait être sérieusement remise en cause.
Comme le rappelle le quotidien, le premier frein est sa complexité administrative. C’est pour cela qu’avait été décidé, dans un premier temps, de ne viser que certaines importations parmi les plus polluantes (acier, fer, aluminium, ciment, engrais, hydrogène et électricité). L’objectif était ainsi de baisser le nombre de quotas, de « droits à polluer » gratuits disponibles sur le marché, et ce jusqu’en 2034, pour inciter les industries à la décarbonation. La Côte d’Ivoire s’était déjà orientée vers cette hypothèse.
À LIRE AUSSI Compétitivité industrielle : ce qu’Emmanuel Macron attend d’Ursula von der Leyen « Ce qui devait être une solution pour protéger la sidérurgie européenne risque de se transformer en un nouveau péril si on ne corrige pas toutes les imperfections de cette taxe », pointe cependant dans Les Échos Bruno Jacquemin, le délégué général d’A3M, le lobby des minerais, minéraux et métaux. Les industriels craignent ainsi une perte de compétitivité à l’export pour ceux qui ne seraient pas décarbonés assez vite.
« Trouver le bon mécanisme […] sans [le] vider de sa substance »
Une autre crainte est celle de l’inflation : « Nos produits contiennent 70 % à 85 % de métaux, cette taxe risque de renchérir le prix de nos poêles de 5 % dans le meilleur des cas et de 40 % dans le pire des cas », pointe ainsi Olivier Brault, responsable des affaires publiques chez SEB et président de la fédération du « Cookware » en Europe, dans le journal économique.
Si des puissances politiques européennes appellent à un report de la mise en œuvre du texte, certains industriels n’exigent qu’un maintien des quotas des émissions de CO2 gratuits jusqu’à 2030, le temps de corriger le tir. La Commission européenne va se pencher sur le sujet à partir du 26 février. Plus de 80 % des entreprises éligibles pourraient être exemptées, notamment les PME, selon Wopke Hoekstra, commissaire européen chargé du climat, au Financial Times.
« Si vous exportez dans un pays qui ne pénalise pas les émissions de CO2, vous êtes mécaniquement moins compétitif, il faut trouver le bon mécanisme pour protéger la production exportée sans vider de sa substance le mécanisme », admet Pascxal Canfin, député européen. Sans compter que la réouverture de débats sur la législation, c’est la réouverture d’une boîte de Pandore : les Allemands, rappelle Le Parisien, n’ont jamais vu d’un très bon œil ce projet… Qui s’apprête à subir un rabotage plus violent ?