June 8, 2025

Le New York Times explique pourquoi le Maroc est la porte d’entrée de la Chine en Europe

Hespress Français – Actualités du Maroc Hicham Oukerzaz

Le Maroc, devenu en 2023 le premier exportateur de voitures vers l’Union européenne, attire de plus en plus d’investissements chinois dans les batteries et les véhicules électriques, selon un article de la journaliste Patricia Cohen publié par The New York Times. Pour Pékin, le Royaume représente une base de production alternative et avantageuse aux portes de l’Europe.

Le New York Times explique pourquoi le Maroc est la porte d'entrée de la Chine en Europe

Tandis que les tensions commerciales entre la Chine, les États-Unis et l’Europe s’exacerbent, le Maroc s’impose comme une destination privilégiée pour les industriels cherchant à sécuriser leurs débouchés européens. L’attractivité du Royaume ne tient pas seulement à ses coûts compétitifs ou à sa proximité logistique avec le Vieux Continent, mais aussi à sa capacité à entretenir des partenariats multiples, équilibrés et pragmatiques. C’est ce que met en lumière un article de Patricia Cohen, paru le mercredi 7 mai 2025 dans The New York Times, qui décrypte comment Rabat gère cette montée en puissance chinoise tout en maintenant ses liens stratégiques avec Washington et Bruxelles.

Dans son article, la journaliste rappelle, en se référant à l’Auto World Journal, que le Maroc a dépassé la Chine, l’Inde et le Japon en 2023 pour devenir le premier exportateur de voitures vers l’Union européenne. Cette performance résulte d’une stratégie industrielle soutenue, amorcée depuis plus de vingt ans, avec notamment l’implantation de Renault puis de Stellantis, indique-t-elle.

Aujourd’hui, lits dans The New York Times, cette dynamique séduit également les groupes chinois, qui y voient une base manufacturière stable et ouverte vers l’Europe. Pour Pékin, le Maroc constitue une solution efficace pour réduire l’exposition directe aux taxes européennes sans renoncer à son ambition de peser sur le marché automobile européen.

Le journal cite notamment Ahmed Aboudouh, expert associé à Chatham House, pour qui le Maroc joue “le même rôle pour la Chine vis-à-vis de l’Europe que le Mexique pour les États-Unis”. D’un côté, le Royaume entretient une relation étroite avec Pékin, qui l’a soutenu dans ses efforts de développement via l’Initiative des Nouvelles routes de la soie. De l’autre, il reste solidement arrimé à ses partenaires occidentaux, États-Unis en tête.

Plusieurs projets emblématiques illustrent ce tournant. En janvier, un fabricant chinois de pièces pour batteries a lancé la production à Jorf Lasfar dans le cadre d’une coentreprise de 2 milliards de dollars. En octobre, le fabricant de pneus Sentury a ouvert une usine dans la zone industrielle de Tangier Tech City, censée accueillir à terme 200 entreprises chinoises. Et le géant Gotion a annoncé une “gigafactory” d’un montant initial de 1,3 milliard de dollars, qui pourrait atteindre 6,5 milliards à terme. Tous ces projets sont mentionnés par Patricia Cohen dans The New York Times comme indicateurs de l’intérêt croissant de la Chine pour le Maroc.

Mais ce recentrage comporte aussi des risques géopolitiques. Dans son article, Patricia Cohen rappelle que l’administration Trump pourrait afficher des positions commerciales plus agressives. Rabat, qui bénéficie d’un accord de libre-échange avec Washington depuis vingt ans, reste jusqu’ici épargné par les surtaxes massives que les États-Unis appliquent à des pays comme le Mexique ou le Vietnam. Toutefois, The New York Times note que “si la Chine continue de renforcer sa présence industrielle au Maroc, ce dernier pourrait être appelé à choisir son camp”.

La reconnaissance américaine de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental, demeure un pilier diplomatique fondamental. The New York Times indique que Rabat ne prendra aucun risque susceptible de remettre en cause cette avancée. Le Royaume reste un allié des États-Unis, engagé dans des exercices militaires conjoints avec l’OTAN et intéressé par l’acquisition d’avions F-35. D’après Aboudouh, “le Maroc ne fera pas de place à la Chine aux dépens de l’Europe ou des États-Unis”.

Pour The New York Times, le Royaume poursuit donc une stratégie d’équilibre. Il mise sur les capitaux chinois pour soutenir sa montée en gamme industrielle, tout en consolidant ses alliances historiques. Cette approche prudente a jusqu’ici porté ses fruits : le Maroc s’affirme comme un hub africain à vocation euro-méditerranéenne, capable d’attirer les géants mondiaux tout en restant maître de son positionnement géopolitique.