June 9, 2025

Le Maroc lance l’appel pour un marché unique de l’assurance au service de l’Afrique (FANAF)

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Les travaux de la 49e Assemblée Générale de la FANAF (Fédération des Sociétés d’Assurances de Droit National Africaines) ont réuni lundi dernier, plus de 1.500 délégués venus d’Afrique et d’ailleurs pour discuter des enjeux et perspectives du secteur de l’assurance sur le continent. Placé sous le Haut Patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, cet événement, organisé en partenariat avec la Fédération Marocaine de l’Assurance (FMA), s’articule autour du thème « Quels leviers pour un développement inclusif et durable de l’assurance en Afrique ?».

Rochdi Mokhliss

Lors de ce Rendez-Vous Continental, Mohammed Hassan Bensalah, président de la FMA, a plaidé en faveur d’une évolution vers un marché unique de l’assurance en Afrique. Selon lui, l’assurance doit être un véritable levier de protection et d’accompagnement des populations, en particulier les plus vulnérables. « Nous avons pour mission d’élargir la couverture des acteurs économiques et renforcer la protection de nos concitoyens. La micro-assurance n’est plus une option, c’est une priorité pour notre marché », a-t-il affirmé. Il a insisté sur la nécessité de renforcer la culture de l’assurance et d’établir une relation de confiance avec les assurés, en soulignant que le digital, bien qu’essentiel, ne peut remplacer l’importance du contact humain dans ce domaine.

Bensalah a également appelé à un renforcement du rôle des pouvoirs publics, notamment par la mise en place de couvertures obligatoires comme l’assurance multirisques habitation ou la responsabilité civile professionnelle pour certains secteurs à risque. Il a cité l’exemple de Marrakech, qui a su rebondir après un séisme grâce au régime de couverture des événements catastrophiques mis en place en 2020. « Nous gagnerons à être unis et solidaires afin de renforcer notre capacité à couvrir efficacement les risques africains. Il est temps d’adopter une vision plus ambitieuse et de tracer la voie vers un marché unique de l’assurance en Afrique », a-t-il conclu.
Depuis le 30 décembre 2024, les assurances « Tous Risques Chantier » (TRC) et « Responsabilité Civile Décennale » (RCD) sont devenues obligatoires au Maroc, conformément à la publication au Bulletin Officiel du 30 décembre 2024. Décryptage.

De son côté, la ministre de l’Économie et des Finances, Nadia Fettah Alaoui, a rappelé l’engagement du Maroc en faveur de l’inclusion financière. « Nous démarrons en 2025 la deuxième phase de notre stratégie nationale d’inclusion financière, qui vise à élargir l’accès aux services financiers pour toutes les catégories de la population », a-t-elle déclaré. Elle a souligné que le taux d’inclusion financière au Maroc est passé de 29% en 2017 à plus de 54% en 2023, avec un objectif de 75% à l’horizon 2030.

La ministre a également mis en avant le potentiel de l’assurance paramétrique, particulièrement utile pour la couverture des risques climatiques. « D’ici 2050, les pertes économiques liées aux catastrophes naturelles en Afrique pourraient atteindre 50 milliards de dollars par an, ce qui souligne la nécessité d’une couverture assurantielle efficace », a-t-elle averti. Elle a aussi mis en lumière le rôle des opérateurs télécoms dans la distribution des produits d’assurance, citant les succès du Kenya et de la Tanzanie comme modèles.

Abderrahim Chaffai, président de l’ACAPS, a quant à lui insisté sur la modernisation du cadre réglementaire et l’extension des canaux de distribution. « L’intégration de nouveaux outils permet de réduire les écarts de protection et de favoriser une plus grande inclusion financière », a-t-il déclaré. Face à un taux de pénétration de l’assurance ne dépassant pas 3,5% en moyenne en Afrique, il a appelé à une régulation adaptée et à une concertation accrue entre les pays.

César Ekomie Afene, président de la FANAF, a salué l’implication du Maroc et de ses acteurs financiers dans le développement de solutions assurantielles panafricaines. « Le Maroc est un exemple de dynamisme et de vision panafricaniste dans le secteur des assurances », a-t-il affirmé, soulignant l’importance de la digitalisation et de la micro-assurance pour répondre aux besoins des populations.

Harmonisation des régulations et l’innovation technologique, clés pour le développement du secteur en Afrique

Lors d’un panel consacré à l’assurance et la réassurance en Afrique, Constant Assi, Directeur Général de SUNU Services, a mis en exergue les disparités régionales du secteur. Tandis que l’Afrique du Sud affiche un taux de pénétration de plus de 68%, certaines régions comme l’Afrique de l’Ouest et de l’Est peinent à atteindre les 3 à 4%. Il a pointé du doigt les problèmes de confiance envers les assureurs, la faible bancarisation et l’absence de couverture de santé suffisante.

Pour sa part, Ouafae Mriouah, Directrice Générale de la Société Centrale de Réassurance (SCR), a mis en avant le potentiel économique du continent, tout en soulignant la fragilité de sa croissance et l’impact des catastrophes naturelles. Elle a insisté sur la nécessité d’une intégration régionale plus forte et d’une amélioration de l’expertise locale pour renforcer la résilience du marché.

L’experte en réassurance a proposé plusieurs solutions concrètes pour le développement de la réassurance en Afrique. Elle a d’abord insisté sur l’importance de l’harmonisation des régulations à l’échelle continentale, soulignant que la diversité des réglementations dans les différentes régions africaines entrave le développement du marché. Elle a plaidé pour une régulation uniforme qui renforcerait la protection des acteurs du marché, tout en permettant une meilleure structuration de l’industrie de la réassurance à l’échelle du continent. Elle a également évoqué la nécessité de tirer parti des nouvelles technologies, qui jouent un rôle clé dans l’amélioration de l’accessibilité aux produits d’assurance, ainsi que dans la sophistication des produits de réassurance. Selon elle, ces outils sont désormais incontournables pour répondre aux besoins croissants du marché africain.

Par ailleurs, Mriouah a mis en lumière l’importance de l’éducation et de la sensibilisation, afin de faire connaître à la fois l’assurance et la réassurance au sein des populations africaines. La collaboration entre acteurs régionaux et internationaux est un levier crucial pour renforcer le secteur, en permettant de mutualiser les ressources et d’enrichir les capacités financières et l’expertise. Ainsi, les partenariats avec des bailleurs de fonds et des ONG internationales, permettent de financer des risques spécifiques à l’Afrique, tels que ceux liés à l’agriculture ou aux catastrophes naturelles. Enfin, elle a plaidé pour le développement de produits d’assurance et de réassurance adaptés aux réalités africaines, en réponse aux risques particuliers du continent, ce qui permettrait d’apporter une couverture plus complète aux populations.

L’Assemblée Générale de la FANAF a été l’occasion de tracer les grandes lignes d’une vision commune pour l’avenir de l’assurance en Afrique, où l’harmonisation des réglementations, l’innovation et la coopération joueront un rôle central dans la transformation du secteur.