June 8, 2025

La ZLECAf, un appel pour l’écosystème des services en faveur du développement

Youssef Tazi Mezalek                                                                                                                                                                                                          Senior Partner                                                                                                                                                                                                                  South Bridge A&I

 

Un Espace intégré de 1,2 Milliards d’Africains

Dans un monde où les frontières économiques se redessinent constamment, le Maroc émerge comme
une puissance pionnière en Afrique, positionnant sa stratégie au cœur du développement continental, en
devenant un véritable moteur d’initiatives africaines tangibles et efficaces. La Zone de libre-échange
continentale africaine (ZLECAf) offre au Maroc des opportunités considérables pour redéfinir son
commerce et son ancrage sur le marché continental africain. Très anticipée et attendue, la circulaire
annonçant la mise en œuvre, spécifiquement sur le volet douanier, de l’accord portant création de la
ZLECAf au Maroc, permet au Royaume de se frayer un accès à un marché commun de plus de 1,2 milliard
de personnes, et aux entreprises marocaines de diversifier leurs débouchés, tout en augmentant leurs
exportations.
En réponse aux évolutions à venir, notamment l’Initiative Royale pour l’Atlantique promouvant la
coopération dans la zone Afro-Atlantique, l’intégration du Maroc à la ZLECAf se conçoit en complément
aux prérequis nécessaires pour un développement soutenable et durable du continent ; dont une analyse
stratégique et une compréhension des enjeux et intérêts mutuels (la carte énergétique régionale, par
exemple), doit permettre la structuration d’initiatives concrètes et réalistes ainsi que le développement
d’une « Offre Maroc ».
S’inscrivant dans l’engagement fort et continu du Maroc dans le renforcement de l’unité africaine et de la
promotion de la coopération régionale sud-sud, cette intégration historique renforce notamment
l’attractivité du pays, et de nos partenaires africains, pour les investissements étrangers, stimule
l’innovation et la compétitivité des entreprises locales, tout en encourageant la création d’emplois, le
développement d’infrastructures et la coopération régionale.
Une aubaine, sous tous rapports, pour le Royaume dont les nombreux atouts stratégiques doivent lui
permettent de consolider ses relations commerciales, de partager ses avantages et ses réalisations en
termes d’infrastructures, de logistiques et de développement social et humains, à travers notamment son
positionnement de véritable Hub africain (déjà anticipé), encore plus accentué dans le cadre de la
ZLECAf.

Un partage d’expertise au service du Continent

Des stratégies sectorielles variées, combinées à des investissements massifs dans les infrastructures et la
logistique, montrent l’engagement du pays à construire un avenir prospère non seulement pour lui-
même mais aussi pour ses voisins africains. Le renforcement du capital humain, à travers une formation
professionnelle adaptée et ciblée, est une pierre angulaire de cette vision (qui se matérialise notamment à
travers l’initiative pionnière de la Fondation africaine pour l’apprentissage tout au long de la vie, au niveau
continental).
Cependant, l’intégration complète du Maroc à cette zone économique exige une attention particulière sur
plusieurs paramètres structurels et un accompagnement spécifique pour sensibiliser et préparer les
entreprises marocaines aux nouvelles perspectives et dynamiques de marché qui s’offrent au pays.
Ajustements réglementaires nécessaires, mécanismes d’incitation, harmonisation des standards, mise en
place d’infrastructures adéquates, connectivité… en abordant de manière proactive ces enjeux, le Maroc
se positionne avec une offre intégrée lui permettant aussi bien de profiter pleinement des opportunités
offertes par la ZLECAF, que de renforcer sa position d’acteur économique clé en Afrique dans le domaine
des industries manufacturières et des services.

La ZLECAf, un appel pour l’écosystème des services en faveur du développement

Pour les entreprises marocaines de services, l’Accord de la ZLECAf fait progressivement tomber les
barrières commerciales, allège les procédures réglementaires, et met à disposition une plateforme intra-
africaine sans précédent qui permet d’étendre leur portée et leur influence à travers le continent, dans
des domaines clés tels que les services financiers, le tourisme, les télécommunications, la logistique, les
technologies de l’information et le conseil. Des secteurs par ailleurs appelés à jouer un rôle central dans                                                                      le développement du continent puisque les télécommunications peuvent considérablement améliorer la
connectivité numérique entre les nations africaines, et in fine, faciliter un échange plus fluide
d’informations, les services financiers ont le potentiel de renforcer l’inclusion financière en offrant des
produits et solutions spécialement conçus pour répondre aux exigences locales.
Le développement des infrastructures digitales représente un vecteur d’avenir crucial pour l’ensemble de
l’écosystème des acteurs du numérique, comme en témoigne la réussite éclatante du GITEX Africa,
organisé pour la seconde année consécutive à Marrakech. En soutenant l’implantation de solutions
innovantes, le Maroc peut favorablement contribuer à réduire la fracture numérique et à promouvoir des
technologies d’avenir. Cela inclut la diffusion de solutions fintech, de plateformes de e-commerce
africaines, ainsi que de solutions healthtech dédiées à l’amélioration de la santé des citoyens africains.
De même, les entreprises de conseil et de logistiques sont appelées à jouer un rôle décisif dans
l’expansion régionale grâce à leur fort ancrage local et leurs solutions bien intégrées. Les technologies de
l’information, quant à elles, peuvent fournir des plateformes innovantes pour le commerce électronique,
la gestion de la chaîne d’approvisionnement et la transformation numérique des entreprises.

Des mécanismes à instaurer pour être au niveau des enjeux colossaux

Afin de tirer pleinement profit des opportunités de la ZLECAf, les entreprises marocaines ne peuvent faire
l’impasse sur un soutien approprié, à l’instar de ce que font nos concurrents. Ce soutient inclue des aides
financières, des subventions, des prêts à faible taux d’intérêt ou l’appui de fonds d’investissement
destinés à surmonter les défis financiers liés à l’expansion.
Il est également crucial de déployer des formations spécialisées au profit des ressources humaines afin
de les aider au mieux à appréhender et à s’adapter aux spécificités des marchés marocains, et de faciliter
l’accès à l’information sur les marchés étrangers, y compris des études de marché, des analyses de
tendances et des détails sur les réglementations locales et permettre aux entreprises se conformer aux
lois et réglementations des pays où elles opèrent.
La mise en place de mécanismes et instruments financiers est plus que jamais indispensable afin de
sécuriser et de promouvoir l’exportation de services à travers le continent, en atténuant les risques
associés aux fluctuations des marchés et aux barrières commerciales. Un fonds de garantie efficace
pourrait couvrir divers risques, tels que les défaillances de paiement ou les problèmes politiques et
économiques dans les pays destinataires. En somme, des outils essentiels pour catalyser l’expansion des
entreprises dans le cadre de la ZLECAf, en leur fournissant le soutien nécessaire pour naviguer avec
succès sur un marché africain élargi.
Toutefois, la ZLECAf ne se limite pas seulement à offrir des opportunités d’exportation de services au
secteur privé marocain : elle rend également le pays plus attractif pour les investisseurs et les entreprises
africaines souhaitant s’implanter au Royaume ou accéder à des marchés européens et mondiaux via le
pays.

Une économie au service du développement en Afrique                                                                                                                                   

Si l’on ne présente plus les atouts politiques et géographiques qui positionnent idéalement le Maroc
comme Hub africain de services, il est, à juste titre, nécessaire de rappeler les atouts stratégiques que le
Royaume apporte à cette dynamique commerciale continentale. Une économie variée avec des secteurs
forts tels que l'industrie (automobile notamment), l’agro-industrie, ou les énergies renouvelables ; mais
surtout des avancées et un savoir-faire valorisé dans les grandes avancées sociales, notamment la santé
ou la formation.
Cette diversification lui confère une robustesse économique et une profondeur de marché qui attirent les
investisseurs et facilitent le développement de partenariats commerciaux. Ce, dans un environnement
d’affaires favorable et marqué par des réformes économiques continues, un cadre juridique attractif et
des partenariats renforcés avec les acteurs publics marocains.

Ainsi, de nombreux groupes internationaux de services ont déjà choisi le Maroc pour établir leurs QG
régionaux, attirés par le dynamisme et le potentiel du marché marocain. En testant le Royaume comme
hub régional, ils bénéficient non seulement d’un accès privilégié au vaste marché local mais aussi aux
marchés voisins, profitant ainsi de la stabilité politique et économique du pays et d’un centre financier de
premier plan en Afrique : la place Casablanca Finance City (CFC). Une plateforme financière avec des
débuts réussis et qui renforce l’« Offre Maroc », en facilitant les investissements étrangers et en servant
de liaison entre les marchés financiers africains et mondiaux.
De plus, le Royaume a adopté pour des politiques commerciales actives visant à établir des relations
solides, avec l’Europe, sa vocation Atlantique affirmée, son partenariat unique avec mes pays du Golfe,
mais aussi à travers tout le continent africain. Complétées par des capacités de production compétitives,
ces politiques permettent au Maroc de proposer des produits et des services à des coûts avantageux tout
en maintenant un standard de qualité élevé et de positionner encore plus comme hub triangulaire entre
ces différents partenaires avec qui il a tissé des accords qui lui confèrent un positionnement unique.
La politique de visas déployée est également un atout indéniable, puisqu’en facilitant l'entrée des
ressortissants africains sur son territoire, le Maroc renforce les liens commerciaux et culturels et soutient
son image de pays ouvert et accueillant, essentiel pour un hub de services.
Néanmoins, pour que le Royaume puisse pleinement exploiter et étendre son rôle de leader dans le
secteur des services, plusieurs mesures d’accompagnement sont nécessaires. Il est crucial de développer
des solutions d'assurance spécifiques pour les métiers de services, notamment dans le très sollicité
secteur du conseil, pour contourner les défaillances de paiement, et assurer des garanties financières
rassurant les entreprises.
Autre point déterminant : la mise en place de mécanismes d’incitation pour attirer et retenir les talents au
Maroc. Cela peut se traduire par des avantages fiscaux, des programmes de formation professionnelle ou
des infrastructures de transport améliorées, rendant le Maroc non seulement un centre de production
mais aussi un pôle attractif pour les compétences internationales.
En conclusion, le Royaume possède une multitude d’avantages concurrentiels qui le prédisposent à
naturellement devenir un leader des services en Afrique, avec l’appui de l’Accord de la ZLECAf. Toutefois,
l’optimisation de ces avantages nécessite une approche stratégique intégrée et impérative qui englobe le
développement économique, la facilitation des échanges, et une politique d’accueil forte et efficace.
Mis en œuvre de façon synergique, ces efforts maximiseront le potentiel des entreprises marocaines de
services mais aussi des institutions financières, des chambres de commerce et des associations
professionnelles marocaines, pour positionner durablement le pays sur un marché unique et catalyseur
d’une nouvelle ère.