La Banque mondiale lance son nouvel outil d’évaluation de la compétitivité des pays
Classe Export
Pierre Olivier ROUAUD
Marqué par des soupçons quant au traitement des données, le Doing Business, ex-classement vedette de l’institution de Washington, cède la place à un nouvel outil et passe en revue 50 pays.
Adieu Doing Business, bonjour Business Ready. La Banque mondiale vient de publier ce 3 octobre la première édition de son nouvel outil d’évaluation des pays en matière de facilité à faire des affaires. Business Ready, ou B-Ready comme il est déjà surnommé, remplace donc le Doing Business bien connu de tous les opérateurs des investissements internationaux. Un rapport dont les jugements annuels étaient souvent vivement salués -ou vigoureusement décriés, selon les résultats- par les gouvernements autour de la planète.
Publié depuis 2003, Doing Business a vu sa parution stoppée net il y a trois ans sur des soupçons de traitement « non approprié » des données et de pressions internes, en particulier pour le classement de la Chine et de l’Arabie saoudite. Ces faits graves ont été mis en lumière par une enquête menée par un cabinet indépendant. Ils ont conduit à l’arrêt pur et simple de l’édition de 2021. Depuis, la Banque mondiale a décidé de revoir de fond en comble ses méthodes et grilles d’analyse. Dans le détail, si Doing Business était axé sur l’environnement des affaires et les contraintes réglementaires, surtout pour les PME, le projet B-Ready promet de cibler le secteur privé dans son ensemble. Le projet reste peu ou prou le même : « B-Ready évalue le fardeau réglementaire ainsi que la qualité des réglementations et des dispositions liées aux services publics, ainsi que la facilité de conformité au cadre réglementaire et l’utilisation efficace des services publics directement pertinents pour les entreprises », précise le rapport dans son avant-propos. Fait nouveau, il intègre les aspects inclusifs et durables du développement du secteur privé, en particulier les bénéfices sociaux. Cette nouveauté se veut une réponse aux critiques récurrentes de certaines ONG qui accusaient le rapport Doing Business de faire la part trop belle aux pays ayant un règlement du travail très flexible. En termes d’analyse, si Doing Business s’appuyait avant tout sur des experts et la lecture des textes réglementaires, B-Ready se propose de combiner des consultations d’experts et des enquêtes auprès des entreprises pour obtenir une vision « équilibrée » des aspects de jure et de facto du droit. Pour cela, selon la Banque mondiale, des données ont été collectées sur près de 1 200 indicateurs.
Signe des temps, la publication est accompagnée d’un guide méthodologique de 89 pages. Les sujets (« Topics ») pris en compte par le nouveau rapport sont au nombre de dix et sont censés couvrir toutes les étapes du cycle de vie des entreprises. Ces dix sujets portent sur les formalités d’installation, la localisation physique, les réseaux (eau, électricité, etc. ), le droit du travail, la qualité des services financiers, la facilité de commercer internationalement, la fiscalité, le contentieux commercial, la loyauté de la concurrence et enfin le règlement des faillites. Pour chacune de ces thématiques, B-Ready considère trois piliers (« Pilars ») : le cadre réglementaire, le niveau des services publics et l’efficacité opérationnelle. Tous les sujets (Topics) sont examinés sous ces trois piliers, pays par pays. A ce titre, un outil de visualisation en ligne est disponible sur la page Web vouée au rapport. Point important, si le Doing Business comprenait plus de 190 pays et économies, la première édition du B-Ready voit l’absence de la plupart des plus grandes économies de la planète : États-Unis, Chine, Japon, Allemagne, etc.. y compris la France. Il comporte 50 évaluations de nations pour la plupart des pays émergents mais pas seulement. Ainsi, deux pays européens figurent en tête des classements : la Hongrie pour le pilier I « Cadre réglementaire » et l’Estonie pour le pilier II « Niveau des services publics ». Quant au champion du pilier III, il s’agit tout simplement de la Cité État de Singapour, qui figurait à chaque fois dans les toutes premières places du Doing Business. Décidément, il faut que tout change pour que rien ne change…