Doublés, maintenus, en sursis… Le point sur les différents droits de douane de Donald Trump
Economie. Le président américain menace de nouveau ses partenaires de surtaxes supplémentaires. A partir du 4 juin, elles seront doublées pour les importations d’acier et d’aluminium aux Etats-Unis.
Le président américain Donald Trump à Washington, le 30 mai 2025.
Andrew Leyden / NurPhoto / NurPhoto via AFP
Il ne renonce pas à son arme favorite. Engagé dans une guerre commerciale lancée tous azimuts depuis le début de son mandat, en janvier dernier, le président américain Donald Trump laisse encore une fois planer la menace de nouveaux droits de douane envers ses partenaires commerciaux. Dans la continuité de premières mesures douanières contre le Canada, le Mexique ou la Chine juste après sa prise de pouvoir à la Maison-Blanche, le milliardaire avait créé une panique boursière mondiale début avril, lors de l’annonce de l’imposition de surtaxes réciproques sur la quasi-totalité des produits exportés sur le territoire américain. La plupart d’entre elles ont depuis été suspendues pendant 90 jours le temps de négocier des compromis bilatéraux avec Washington.
Mais les accords conclus se font pour le moment rares. Pire : Donald Trump vient d’annoncer, samedi 31 mai, le doublement de 25 à 50 % des droits de douane sur l’ensemble des exportations d’acier et d’aluminium aux États-Unis. « Nos industries de l’acier et de l’aluminium vont être plus fortes que jamais », s’est réjoui le magnat, dans un message publié sur son compte de son propre réseau Truth Social. Cette décision intervient alors que le secteur sidérurgique est particulièrement en difficulté outre-Atlantique, en particulier face à la production intensive de la Chine en la matière sur le marché mondial.
Tensions avec l’Europe
Après une légère accalmie, ce énième coup de boutoir apparaît comme la volonté de Donald Trump d’accentuer la pression sur les puissances du monde entier afin d’aboutir aux fameux « deals » espérés par le milliardaire. Le temps presse : la période de suspension des surtaxes réciproques, fixées à 20 % sur les produits de l’UE, n’est effective que jusqu’à début juillet. Or, la nouvelle mesure annoncée sur l’acier et l’aluminium n’est pas de nature à apaiser les discussions. En réponse, l’Union européenne a fait savoir que des « contre-mesures […] prendront automatiquement effet le 14 juillet » si « aucune solution mutuellement acceptable » n’était trouvée avec les États-Unis. Selon Bruxelles, la riposte pourrait même intervenir « plus tôt si les circonstances l’exigent ».
Les discussions sur les droits de douane réciproques patinent entre la Commission européenne et l’administration américaine ces dernières semaines. Un coup de fil de la présidente de l’exécutif européen, Ursula von der Leyen, à son homologue américain a finalement convaincu ce dernier de reporter la mise en place de surtaxes punitives de 50 % sur l’ensemble des marchandises européennes. Agacé par des négociations jugées trop lentes, Donald Trump souhaitait initialement les voir appliquer dès le 1er juin… Dans le même temps, la pression économique continue de s’accentuer : un tarif douanier de 25 % continue de s’appliquer sur les automobiles, y compris européennes, exportées aux États-Unis. Tout comme une surtaxe universelle de 10 % pour tout produit franchissant les frontières américaines.
Vietnam, Japon… Certaines puissances seraient davantage proches d’un accord commercial avec la Maison-Blanche, selon la presse américaine. Sans avoir définitivement signé les conditions d’un partenariat. Pour le moment, le seul pays à avoir réellement tiré son épingle du jeu reste le Royaume-Uni. Début mai, le Premier ministre britannique Keir Starmer avait salué la création d’une « plateforme incroyable pour l’avenir » avec les États-Unis après des négociations fructueuses entre les deux pays. Le travailliste a ainsi obtenu un allègement de la taxe sur l’automobile et l’annulation de celle sur le secteur sidérurgique pour les marchandises venues du royaume. Mais ces avancées ont été établies aux prix d’importantes concessions accordées à Washington, dont les contours demeurent aujourd’hui flous.
Nouvelle dégradation avec la Chine
L’autre grande préoccupation du président américain ? L’état des négociations avec la Chine, seule nation à avoir été continuellement ciblée par des surtaxes réciproques depuis début avril. Donald Trump a d’abord tenté de pousser à l’extrême le rapport de force, infligeant 145 % de tarifs douaniers à Pékin. Le pouvoir de Xi Jinping a pour sa part répondu avec d’autres importantes barrières commerciales, d’un niveau de 125 %. Au cours du printemps, Donald Trump avait un tant soit peu adouci sa position. D’abord en exemptant les semi-conducteurs, les téléphones portables et les ordinateurs de ces nouvelles mesures, puis en favorisant des discussions bilatérales directes entre les deux puissances rivales en Suisse, mi-mai.
Les différentes sessions de négociations avaient débouché sur la suspension de l’escalade douanière, avec un abaissement des surtaxes à 30 % pour Washington et à 10 % pour Pékin. Mais l’entente a fait long feu… « Sans grande surprise, la Chine a totalement violé son accord avec nous », a martelé vendredi 30 mai Donald Trump, toujours sur Truth Social. Des accusations jugées « fallacieuses » et « déraisonnables » par l’exécutif chinois ce lundi 2 juin. Les États-Unis ont « successivement introduit un certain nombre de mesures restrictives discriminatoires à l’encontre de la Chine », estime le ministère chinois du Commerce. Le secrétaire américain au Trésor, Scott Bessent, a lancé l’idée d’un appel téléphonique entre Donald Trump et Xi Jinping, se disant « convaincu » qu’un tel coup de fil pourrait régler la mésentente.
Décisions judiciaires défavorables
Au-delà des différentes négociations menées avec ces multiples États, l’administration Trump fait face à un autre danger : la possible annulation en justice de ses surtaxes réciproques. Elle a connu une première déconvenue sur ce terrain il y a quelques jours. Le tribunal de commerce international des États-Unis (ITC) a ainsi estimé que le président américain n’avait pas le droit d’imposer lui-même de telles sanctions douanières générales à la plupart des pays du monde. Donald Trump avait invoqué la loi d’urgence économique de 1977 (IEEPA) pour mettre en place ces mesures.
Impossible, a donc répondu la justice, interrompant du même fait plusieurs séries de droits de douane lancés par le président américain, dont ceux dits réciproques. Les surtaxes sur des secteurs précis (la sidérurgie, l’automobile) ne sont en revanche pas concernées. Mais cette décision a elle-même été suspendue depuis par une cour d’appel, le temps de pouvoir rendre sa décision définitive sur le fond de l’affaire. La même semaine, un second tribunal américain, qui siège à Washington, a par ailleurs jugé « illégales » les surtaxes visant en particulier le Canada, le Mexique et la Chine.
Peu importe pour l’administration Trump, toujours bien décidée à poursuivre son plan protectionniste. « Les tarifs douaniers ne vont pas disparaître », a promis sur Fox News le secrétaire américain au Commerce, Howard Lutnick, en réaction à ces décisions judiciaires. Selon le responsable, un ultimatum est désormais fixé à l’ensemble des pays négociant avec les États-Unis pour éviter des droits de douane au terme des 90 jours de suspension octroyés par Donald Trump. « Je pense que c’est la date limite, puis le président déterminera simplement quels taux auront les gens s’ils ne parviennent pas à conclure un accord. »