Décision de la CJUE: Un expert pointe 5 erreurs d’appréciation
Hespress Français – Actualités du Maroc

Yasmine Saih
La décision de la Cour de justice de l’Union européenne concernant les accords agricoles et de pêche signés en 2019 entre l’Union Européenne et le Maroc, comporte des erreurs d’appréciation et un manque d’équilibre en plus d’une prise de position « politique » évidente, a estimé l’analyste politique Mohamed Bouden.
Dans une analyse de la décision de la Cour européenne de justice (CJUE) et une lecture de son contenu, l’expert a relevé plusieurs points qui démontrent un parti pris des juristes dans cette affaire, en plus d’un manque de recherche et de jurisprudence.
Cette décision « n’a apporté aucune contribution légale à la jurisprudence internationale concernant le dossier du Sahara marocain », a expliqué d’emblée Mohamed Bouden pour Hespress FR, notant qu’au contraire, « elle a excessivement intégré certains concepts politiquement chargés dans le texte de la décision, ce qui était un premier indicateur d’un biais clair dans les éléments d’équilibre de la décision ».
Pour lui, la décision finale de la CJUE rendue le 4 octobre, « montre qu’elle n’était pas à l’abri des influences politiques et portait atteinte à la souveraineté d’un pays partenaire de l’Union européenne ».
Cinq éléments juridiques qui prouvent l’erreur de jugement
Analysant les éléments qui montrent la faiblesse de ce jugement et sa portée politique et non juridique, Mohamed Bouden a estimé que d’abord, la décision a été basée sur une interprétation étroite et des faits, tout en enfreignant l’esprit de la Charte des Nations Unies (signée en 1945), en particulier les dispositions des articles 1 et 73.
Elle comporte en outre une lecture « tronquée et opportuniste » de la Convention de Vienne sur le droit des traités signée en 1969, en négligeant l’article 26 qui stipule que le contrat est la loi des parties contractantes, et l’article 27 qui interdit à toute partie d’invoquer ses propres textes de droit interne comme justification d’un manquement à l’exécution du traité. « Dans ce cas, la Cour de justice de l’Union européenne s’est appuyée sur le droit interne européen », a expliqué l’expert.
Troisièmement, « la Cour ne peut pas interpréter les principes d’autodétermination d’une manière unilatérale sans tenir compte des opinions juridiques (autodétermination interne, démocratique et développementale) et des jurisprudences (décisions de la Cour d’appel de Londres et de la Cour de Tarascon, etc.) ainsi que des décisions souveraines des États soutenant l’initiative d’autonomie, notamment 19 États européens », a rappelé Bouden.
Toutes ces choses ont été volontairement négligée dans la décision de la Cour européenne, dont les jugements ont suscité récemment des controverses à cause des critères qu’elles applique. L’on peut citer à titre d’exemple, le refus de deux pays membres de l’Union européenne, d’accepter et d’appliquer une décisions de ladite Cour.
Quatrième élément, la formulation de la décision de la CJUE contient des connotations politiques qui sont loin de la compétence de la Cour qui devait s’appuyer uniquement sur une base juridique. « Malgré son incapacité à déterminer la signification et l’étendue du +peuple du Sahara occidental+, elle a néanmoins pris le risque de s’appuyer sur ce récit fictif chargé de connotations politiques », a souligné notre interlocuteur.
Enfin, cinquièmement, ce peuple du Sahara dont il est question et qui n’aurait semble-t-il pas été consulté pour ces accords, profite des retours et des fruits de ces accords. La décision n’a pas pris en compte l’impact du développement sur la réalité de vie des habitants du Sahara marocain et la stabilité de la région, les accords entre le Maroc et plusieurs autres parties, les opportunités d’investissement et de durabilité économique et sociale dans ces provinces du Sud.
« Les expressions clés contenues dans la décision de la Cour de justice de l’Union européenne sont éloignées de la réalité et de la proportionnalité », a encore relevé l’expert en soutenant qu’« en tenant compte de l’intention de la Cour et en supposant un manque de connaissance de certains faits, il était possible de déduire l’orientation de la décision ».
Pour Mohamed Bouden, la Cour aurait dû s’abstenir de s’impliquer dans des conflits et des disputes politiques et aurait dû respecter les principes de Bangalore concernant la conduite judiciaire, en particulier la confiance des différentes parties prenantes dans l’efficacité de ses procédures.
La décision est « un écran de fumée pour dissimuler les droits historiques et les fondements juridiques du Royaume du Maroc », estime l’expert et souligne qu’elle vient en contradiction explicite avec les positions historiques de l’Espagne et de la France, qui sont considérées comme des témoins historiques des droits souverains du Maroc, compte tenu de leur passé dans la région.