June 9, 2025

Ultimes réglages avant la mission économique marocaine au Caire du 3 au 5 mai

Barlamane.com

Selon Hassan Sentissi, président de la Confédération marocaine des exportateurs (Asmex), l’Égypte aurait massivement réexporté vers le Maroc des biens d’origine tierce, en infraction avec l’esprit de l’accord. De surcroît, les opérateurs marocains dénonçaient des retards répétés dans le dédouanement de leurs marchandises, certaines cargaisons demeurant bloquées aux douanes égyptiennes pendant plus de six mois sans justification apparente.

À quelques jours de la mission économique marocaine attendue au Caire, du 3 au 5 mai 2025, le Conseil d’affaires Maroc-Égypte finalise ses préparatifs. Issu d’une collaboration entre la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) et l’Association des industriels égyptiens, cet organe, présidé par Ali Tazi et Nezar Ismaïl, entend raviver les liens commerciaux entre Rabat et Le Caire. La mission, conduite par Omar Hejira, secrétaire d’État chargé du commerce extérieur, donnera lieu à un forum économique majeur destiné à encourager les synergies dans des secteurs-clés tels que l’agroalimentaire, l’automobile, les textiles et l’industrie plastique.

Une crise commerciale qui a ralenti les échanges

L’élan actuel survient après plusieurs mois de crispations entre les deux partenaires. Au début de l’année 2025, les autorités marocaines avaient suspendu l’entrée de marchandises égyptiennes dans les ports du royaume, en réaction à des pratiques jugées contraires aux engagements pris dans le cadre de l’Accord d’Agadir. Selon Hassan Sentissi, président de la Confédération marocaine des exportateurs (Asmex), l’Égypte aurait massivement réexporté vers le Maroc des produits d’origine étrangère, en violation des exigences de fabrication locale imposées par l’accord de libre-échange, signé en 2004 et entré en vigueur en 2007.

Les opérateurs marocains avaient également dénoncé le traitement discriminatoire réservé à leurs expéditions, parfois bloquées durant plus de six mois dans les ports égyptiens sans justification claire. En novembre 2024, plus de 840 conteneurs marocains demeuraient ainsi immobilisés en Égypte. Face à cette situation, Rabat avait pris des mesures de rétorsion en suspendant l’entrée de 150 conteneurs égyptiens sur son territoire.

Un déséquilibre commercial manifeste

Les chiffres officiels ont confirmé l’ampleur du déséquilibre au détriment du Maroc. Selon le Bureau de change, les importations marocaines en provenance d’Égypte ont atteint 804 millions de dirhams (soit 80,4 millions de dollars) en novembre 2024, tandis que les exportations marocaines vers l’Égypte ont chuté à 11 millions de dirhams (1,1 million de dollars), contre 17 millions un an plus tôt.

Du côté égyptien, un rapport du ministère du Commerce extérieur a indiqué que les exportations vers le Maroc avaient progressé de 22,5 % au cours des onze premiers mois de 2024, pour atteindre 896,5 millions de dollars. Les importations égyptiennes de biens marocains, bien qu’en hausse de 91 %, ne représentaient que 41,9 millions de dollars sur la même période.

Les produits égyptiens les plus exportés comprenaient les industries agroalimentaires (pour 209 millions de dollars, en progression de 68 %), les métaux, les appareils électriques, le ciment et les textiles. En réaction, le Maroc avait imposé des mesures antidumping, frappant de droits élevés plusieurs produits égyptiens : 35 % sur les tapis, 30 % sur les tissus et les tomates en conserve.

Une volonté affichée de rééquilibrage

Dans un souci d’apaisement, une délégation égyptienne, conduite par le ministre de l’investissement et du commerce extérieur, Hassan El-Khatib, s’est rendue à Rabat fin mars. Les discussions engagées avec Ryad Mezzour, ministre marocain de l’industrie et du commerce et avec Omar Hejira ont permis d’esquisser une feuille de route commune.

Les deux parties ont ainsi convenu de plusieurs mesures destinées à restaurer la confiance : création d’un canal de communication direct pour résoudre les différends commerciaux ; augmentation ciblée des exportations marocaines vers l’Égypte, notamment dans le secteur automobile ; mise en place d’une procédure accélérée pour l’entrée des produits marocains sur le marché égyptien ; organisation d’un forum économique bilatéral au Caire dès avril ; réactivation du Conseil d’affaires conjoint et préparation de la tenue prochaine de la commission mixte commerciale.

Une coopération fondée sur la confiance mutuelle

Ali Tazi et Nezar Ismaïl ont souligné l’importance d’une coopération fondée sur la transparence et l’équilibre, afin d’éviter le retour des tensions passées. À leurs yeux, l’ancrage des échanges commerciaux doit s’appuyer sur une application rigoureuse des accords existants et sur une volonté partagée de valoriser les complémentarités industrielles.

La mission économique de mai 2025 constituera un test décisif : elle devra permettre non seulement de restaurer le flux des échanges, mais aussi d’amorcer une phase de partenariat stratégique durable entre Rabat et Le Caire.