La fin d’un monde américain
Le Monde
La réélection de Donald Trump pour un second mandat à la Maison Blanche, qu’il a revendiquée mercredi 6 novembre, et le succès du Parti républicain, dont il a pris le contrôle total, constituent un tournant majeur pour les Etats-Unis.
Risque de fracture de l’Europe
Les Européens ont, à juste titre, un mauvais souvenir du premier mandat Trump. Le second sera plus périlleux encore, dans un contexte où la guerre fait rage sur leur continent, livrée par une puissance russe qui fait fi de toutes ses obligations internationales et déploie une agressivité croissante. Si, comme il en a agité la menace pendant la campagne, Donald Trump cesse l’aide militaire à l’Ukraine et négocie avec Vladimir Poutine une paix favorable à l’envahisseur, les conséquences d’un tel dénouement iront bien au-delà du sort de la seule Ukraine : elles porteront sur l’ensemble de la sécurité du continent.
La victoire de Donald Trump au terme d’une campagne d’une virulence populiste, misogyne et raciste sans précédent est aussi de mauvais augure pour les femmes, pour les immigrants et pour la démocratie en général. Le 47e président des Etats-Unis hérite d’un système qu’il a commencé à mettre en place lorsqu’il en était le 45e, un système dans lequel les sacro-saints « checks and balances », ces garde-fous censés préserver les institutions démocratiques américaines, sont déjà affaiblis, et où la Cour suprême lui est acquise. Il a réussi à banaliser l’assaut du Capitole par des émeutiers qu’il avait encouragés, le 6 janvier 2021. L’image d’un chef de l’exécutif de la première puissance mondiale qui qualifie ses opposants d’« ennemis de l’intérieur », en juge certaines dignes du peloton d’exécution, vilipende les médias dissidents et menace d’envoyer l’armée faire la chasse aux immigrés illégaux dans les villes démocrates ne peut en outre qu’encourager tous les dirigeants illibéraux de la planète, y compris en Europe.