L’industrie chimique, pilier de souveraineté et moteur de la transition énergétique au Maroc
La Fédération de la chimie et de la parachimie a donné, ce mercredi à Casablanca, le coup d’envoi de la 3ᵉ édition du Forum international de la chimie. Placée sous le thème «L’industrie chimique marocaine au cœur de la transition énergétique et des enjeux stratégiques», cette édition ambitionne de repositionner la chimie comme levier structurant de souveraineté industrielle et d’accélération de la transition bas carbone du Royaume.
Rochdi Mokhliss
«L’industrie chimique marocaine est un levier de souveraineté industrielle et de transition énergétique», a affirmé Abed Chagar, président de la Fédération de la chimie et de la parachimie (FCP), en ouverture des travaux. La ministre de la Transition énergétique et du développement durable, Leïla Benali, estime que ce Forum constitue une plateforme précieuse d’échange sur les défis et opportunités de ce secteur stratégique. «L’industrie chimique joue un rôle central dans l’accompagnement de la transition énergétique au Maroc», a-t-elle souligné, rappelant l’importance de ce secteur dans des domaines clés tels que l’énergie, l’économie circulaire, la décarbonation ou encore l’hydrogène vert.
Le Maroc a décroché la première place à la 41ème édition des Olympiades nationales de la chimie, organisées le 15 mai à Paris. À l’origine de cette performance remarquable, parmi 3500 jeunes du monde entier, deux élèves du Groupe Scolaire Jacques Chirac de Rabat, Yasmine Kadmiri Idrissi et Yassine Bekkaoui, qui ont su faire rayonner la science marocaine en alliant rigueur académique, créativité et profonde fierté culturelle.
À ce titre, le Royaume affiche des progrès notables. La capacité électrique installée a atteint 12 gigawatts, dont plus de 5 gigawatts d’origine renouvelable. Cette dynamique a permis de faire passer la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique de 37% en 2021 à 45% en avril 2025. À l’horizon 2030, le plan national prévoit le déploiement de plus de 15 gigawatts supplémentaires, pour un investissement global de plus de 120 milliards de dirhams, dont 80% issus de sources renouvelables. Le développement de l’hydrogène vert constitue un axe clé de cette stratégie. «L’hydrogène est essentiel, notamment pour la production d’ammoniac, utilisé dans les engrais et comme carburant pour le transport», a expliqué Leïla Benali.
Elle a mis en avant le programme d’investissement vert du Groupe OCP, qui vise à produire 1 million de tonnes d’ammoniac vert d’ici 2027, avec un objectif de 3 millions de tonnes à l’horizon 2030. Sur ce volet, la chimie intervient comme catalyseur de transformation. Elle optimise les procédés industriels, améliore l’efficacité des réactions chimiques, réduit leur impact environnemental et permet le développement de nouveaux matériaux, comme les membranes protoniques ou les électrodes résistant à des conditions extrêmes. Ces avancées techniques sont indispensables pour la fiabilité et la durabilité des chaînes de valeur liées à l’hydrogène.
Ryad Mezzour, ministre de l’Industrie et du commerce, a pour sa part rappelé le rôle de l’industrie chimique dans le développement de filières stratégiques telles que les batteries, le stockage d’énergie, la pharmacie ou encore les fertilisants. «L’industrie chimique agit comme un moteur d’innovation et de développement transversal», a-t-il affirmé, en soulignant que les conditions actuelles sont particulièrement favorables à l’émergence d’une industrie nationale compétitive.
Même son de cloche du côté d’Ahmed Mahrou, Managing Director de SBU Manufacturing au sein du Groupe OCP, qui a réitéré l’importance de la chimie dans la transition énergétique. Selon lui, la contribution de ce secteur à la production, au stockage et au transport de l’hydrogène constitue un avantage décisif pour l’industrialisation verte du Maroc. Il a également souligné l’importance des catalyseurs et des matériaux avancés dans l’amélioration des rendements énergétiques et la réduction des émissions.
Pour Ahmed Mahrou, la chimie est bien plus qu’un secteur industriel : elle constitue un levier stratégique pour bâtir un modèle industriel plus résilient, souverain et durable. Cette vision se traduit concrètement par des projets structurants à fort impact, à travers lesquels le groupe accompagne l’émergence de nouvelles filières industrielles à haute valeur technologique.
Il cite notamment les batteries de type LFP, le fluor, l’uranium, la silice purifiée ou encore les spécialités chimiques. Autant d’investissements qui visent à positionner le Maroc comme un acteur incontournable dans les chaînes de valeur de demain.
L’économie circulaire occupe également une place centrale dans la stratégie du groupe. L’OCP a atteint une capacité de 200 millions de m³ d’eau traitée par an, destinée aussi bien à ses sites industriels qu’aux villes voisines. Cette capacité devrait être portée à 630 millions de m³ d’ici 2030, afin de répondre aux besoins croissants, notamment du secteur agricole.
L’OCP ambitionne, par ailleurs, de produire 3 millions de tonnes d’engrais totalement décarbonés d’ici 2027, ce qui en ferait le premier acteur mondial à proposer une telle quantité d’engrais à empreinte carbone nulle.